Depuis plusieurs mois, je peins des portraits sur toile de jute.
Une première série représente les personnes que je croise au P.M.U. de Castillon la Bataille entre 7h et 8h.
On ne se connait pas mais un lien s’est créé juste par l’habitude de se croiser tous les matins.
Quand je leur ai proposé de réaliser leur portrait, il n’y eu aucune résistance, ils avaient confiance. Et très vite, le temps d’une pose, les langues se sont déliées. Ils me livraient leur histoire. Des histoires à
l’image de leurs visages marqués.
Des histoires que l’on n’a pas toujours envie d’entendre.
Des histoires que l’on cache. Des histoires qu’ils gardent pour eux et parfois préfèrent noyer dans l’addiction à l’alcool, au jeu ou aux anxiolytiques. Ces histoires qu’on tente d’effacer. Ces histoires qui
ont été fabriquées par une société qui n’assume pas, qui ignore, qui marginalise.
Et puis il y a le patron et les employés, les chasseurs et les ouvriers viticoles...
Une seconde grande toile de 3m par 2m représente des amies. Elles ont accepté de poser pour moi, ensembles, nues.
Elles nous regardent droit dans les yeux, sans séduction. A l’opposé de la femmeobjet, elles imposent leur présence comme une évidence. ELLES SONT sans paraître. Elles ne
revendiquent rien. Ce rien devient impertinent et politique car il désarme l’homme de toutes les
images et les fantasmes qui le rassurent et qu’il maitrise. Face au tableau et à ces femmes qui nous
regardent, je tente de semer le trouble… Comme si nous étions nous même mis à nu et observés.
Il m’a paru évident de compléter l’œuvre picturale par des enregistrements. Ainsi est né le projet de
réaliser un film documentaire et un livre autour de ce travail de peinture sur toile de jute.
Robert Kéramsi
Filmer non pas l'acte de peindre mais ce qui motive cet acte.
Lorsque on entre dans l'atelier "frigo" bordélique de Robert, tous ses grands personnages "sculptures" qui se traînent, s'entassent, s'effilochent nous parlent de l'abandon.
On ne peut pas y entrer sans se faire interpeler dans le silence, par l'une ou l'autre.
Le lieu est à l'image de la ville, éloignée de ce qui palpite, éteinte par une misère trop difficile à dissimuler.
Et pourtant si on tend l'oreille comme le fait Robert, dans cette ville qui est devenue la sienne, qu'il arpente au petit matin, on entend ce a quoi on ne s'attendait pas; les reclus les exclus les isolés, les à-côtés, nous parlent d'eux, et nous ressemblent.
Robert, un artiste capable de tout mais qui se demande comment/pourquoi produire encore, toujours, et pour qui ?
Est ce que créer, c'est décider ou se laisser prendre ?
Robert entame une nouvelle série de toiles : portraits d'hommes et de femmes fracassés par la vie, qu'il croise le matin au Pmu ainsi que la fresque d'une ribambelle de femmes qu'il veut fières et nues.
C'est à la faveur de la fabrication de cette série d'œuvres que je veux tenter de rendre compte de son travail et approcher son questionnement. En filmant ses modèles et en les écoutant.
En filmant l'avancée de ses toiles, elles mêmes regardées par leurs modèles, ou par les visiteurs.
Robert cherche sa place et je me demande à quel endroit l'artiste se sent honnête.
A quel désir répond-il ?
Quelle est la place de l'art dans nos vies ?
Le Projet
Le Crowdfunding
Afin de financer ce projet, j’ai réalisé une série de sculptures et des dessins à
l’encre que je mets en vente à très petits prix ainsi que le livre « L’Imaginée »
et des affiches de mon spectacle « Abrutie » (Sérigraphie).
Merci de me soutenir dans cette entreprise !!